Retour sur soi-même

Publié le par L'occidentale

J’ai reçu quelques mails de quelques lecteurs. J’en ai été très surprise comme très touchée. Malgré le fait que j’écrive sur internet, qui est un « lieu public » et donne un accès public à ce que j’écris, je pensais que les seules personnes qui me lisaient et pouvaient être intéressées par mon récit appartenaient seulement à mon cercle familial et amical. Il faut croire que non.

La dernière lettre que j’ai reçue, de la part d'une très jolie fleur, m’a donnée envie de recommencer à écrire dans ce blog…De continuer à partager ce qui m’est arrivé et ce qui m’arrive pour pouvoir dialoguer avec ceux qui me lise, au hasard du détour d’une page virutelle.

 

Le Viet Nam a fait son chemin, et j’y ai fait mon retour, alors qu’après un tel voyage, je pensais ne plus avoir la force d’y revivre. Mais les miracles du temps m’ont permis d’évoluer et de rouvrir mon cœur… Durant l’automne et l’hiver qui a suivit mon voyage de trois mois et demi au Vietnam, des vagues d’incertitude, de questions, de désillusions, de mal-être, de souvenirs et de réflexions se sont violement déchaînées dans mon esprit et mon être, dans mes pensées éveillées comme dans mon sommeil.

J’ai repris mes trois cursus à l’université en Octobre ce qui m’a pris la plupart de mon temps.

Le premier semestre a été éprouvant. Se remettre en question et dériver à tout hasard n’est pas de tout repos.
Et puis, en Février, je suis retournée trois semaines à SaiGon, pour le nouvel an vietnamien (le Tet). Et là, tout je me suis sentie apaisée.

 

En réalité, passer trois mois dans un pays si lointain et souvent si différent, y vivre comme partie prenante de la société tout en y étant à sa frontière, n’est pas chose si simple. L’adaptation prend du temps. Le temps du choc face aux différences culturelles, le temps des résistances, le temps de l’incompréhension, le temps du doute, le temps de la perdition, le temps de l’aliénation.... tout ce processus est chronophage…Mais pas éternel pour qui a la force et la volonté de le faire aboutir à une autre étape : celle de la compréhension, de l’acception, de l’adaptation. Le temps d’ouvrir des portes qui avaient été fermées face au choc culturel, le temps de trouver ses  repères, ses amis, le temps de nouer des liens, de se trouver soit même dans cet autre univers jusqu’à en le faire devenir sien….Trois mois, ce n’est pas assez pour que la première étape aboutisse à la  deuxième.

La houleuse maturation s’est faite à mon retour en France. Autour de silence, de paroles, de colère, de déception et de réflexion.

Lors du Tet, mon ami avait lui aussi pu prendre ses marques avec ce rythme effraîné de travail et cette nouvelle ville. Il avait d’autres amis et sa sœur. Certains de ses amis étaient contents de me revoir. J’étais attendue. Prendre le temps de parler, prendre le temps de s’installer et de s’intégrer. Ces trois semaines douces et heureuses m’ont permis d’avoir des conversations que jamais je n’aurais imaginé avoir auparavant. J’ai pu nouer plus fort d’autres amitié. J’ai pu comprendre et accepter avec moins de résistance certaines réalités. Je me suis enfin senti bien. Pourtant, j’ai aussi accepté le fait qu’il est très dur de franchir les barrières culturelles, même avec de la bonne volonté. J’avais auparavant pris cette difficulté comme un échec personnel. Mais en réalité, c’est une véritable montagne que peu arrive à déplacer.

Dans beaucoup de couples mixtes, combien ne parlent pas la langue de leur conjoint(e) ? Combien n’ont jamais été dans son pays, y vivre ou essayer d’y trouver des réponses ou des marques ? Combien essaie de prendre autant en compte l’autre, dans sa dimension culturelle ?  La découverte, la vraie, ne se fait pas dans un arc-en-ciel mielleux.

Et puis là, je me suis sentie accueillie, attendue.

Récemment, celle que j’appelais « l’épouse » m’a appelé pour prendre de mes nouvelles et de celles de mon père, gravement malade. Alors qu’elle ne le connaît pas. Alors qu’on ne se connaît pas si bien que ça. Je me souviens aussi d’une de ses paroles. On était chez elle et son mari, le meilleur ami de mon compagnon, m’a demandé en riant : Et toi, Liên, tu t’énerves souvent contre L. ? Et mon compagnon de répondre, un sourire aux lèvres : « non, elle ne crie pas, elle pleure ». J’ai toujours été à fleur de peau, comme si je n’avais pas de défense. Je ne sais pas trop me protéger. Alors je pleure, parce que je ne sais pas quoi faire d’autre. Et après le repas, alors qu’on sortait tous ensemble de la maison pour aller boire un jus au café du coin, « l’épouse » me dit alors : « tu sais, Liên, moi quand il y a une chose qui ne va pas, je le dis directement. Je ne laisse pas passer ». J’ai eu l’impression qu’elle me disait : « tu peux être en colère, tu as le droit. ». Et ça m’avait libéré aussi, parce que j’ai reçu ses paroles comme une confidence, comme un soutien, comme si elle comprenait que je puisse être en colère et que ce soit légitime. Comme si on faisait fi de ma différence ou qu’on l’acceptait. J'étais. Pour moi et pour eux.  

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L
<br /> Merci beaucoup pour ton petit clin d'oeil, qui m'a beaucoup touchée :)<br /> Quel plaisir d'avoir de tes nouvelles, depuis le temps ! Au vu de ce que tu dis, une relation entre Française et Vietnamien(ne) se conquiert petit à petit... non ? Je pense que ça lui donne une<br /> forme de beauté et de préciosité... même si les différences, le premier "rejet", n'aident guère à développer une amitié comme on en a l'habitude ici...<br /> <br /> Comment te situes-tu par rapport à ton avenir maintenant, penses-tu devenir la demi-vietnamienne que tu rêvais de devenir auparavant ? Es-tu devenu plus sainement critique vis à vis de notre<br /> culture française, es-tu déjà devenue un peu vietnamienne dans certaines pensées ou comportements ? Penses-tu vivre réellement un jour au Viêt Nam, ou agir en rapport avec ce pays (dans la<br /> politique, via une entreprise, une ONG, ou que sais-je...) ? T'es-tu mise en colère... ? :D<br /> <br /> <br />
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